Nelson Mandela est un symbole de tous les combats menés en faveur des droits humains. Cet avocat sud-africain, militant acharné contre le régime de l’apartheid qui sévit dans son pays pendant la majeure partie du 20e siècle, est incarcéré au début des années 1960 et semble alors destiné à passer le restant de ses jours en prison. Il en sort cependant en 1990, de deviendra président de l’Afrique du Sud entre 1994 et 1999, avant de finir sa vie en 2013. Pourtant, malgré la vérité incontestable de ces faits historiques, de nombreuses personnes ont cru longtemps à une réalité alternative à propos de Mandela. Ces événements ont permis de mettre à jour la propension potentielle du cerveau humain à croire fermement en des illusions. Ce que l’on a alors appelé l’effet Mandela suscite aujourd’hui des inquiétudes au regard de la montée en puissance des Deep Fakes, issue du développement des nouvelles technologies de communication.
Qu’est-ce que l’effet Mandela ?
En 2010, la blogueuse Fiona Broome évoque les souvenirs qui lui reviennent de la mort de Nelson Mandela, qu’elle situe dans les années 1980. De nombreux membres de sa communauté réagissent alors en confirmant ses propos, et en les étayant à l’aide de leurs propres souvenirs : eux aussi sont complètement persuadés que le militant est décédé en prison, et n’en est donc jamais sorti.
Il leur faudra une longue confrontation avec les faits historiques pour comprendre leur erreur, et cela ne concerne que ceux qui ont réussi à le faire. C’est cela que l’on nomme l’effet Mandela : une gigantesque illusion collective, une fausse mémoire montée de toute pièce mais qui devient la réalité elle-même pour les individus qui sont convaincus qu’ils détiennent la bonne version des événements. Selon une étude, certaines personnes se sont même fondées sur ces faits pour défendre l’existence de réalités alternatives et de mondes parallèles.
Les enseignements de l’effet Mandela : comment le cerveau humain créé de la fausse mémoire
Si l’effet Mandela a été rendu possible, c’est par la conjonction de plusieurs éléments, au centre desquels on trouve les mystères du fonctionnement du cerveau humain. Pour produire une croyance, une illusion dans la véracité de ces réalités alternatives, le cerveau a besoin de plusieurs choses. En premier lieu, des forces sociales doivent agir sur lui. Dans le cas de l’affaire Mandela, ces forces se sont exercées par le biais de certains médias locaux puis internationaux.
A l’époque, ces derniers ont en effet largement relayé la nouvelle de la mort en détention de l’ancien président. Ces nouvelles ont donc permis la possibilité d’une croyance. Le reste du processus à l’origine de l’effet Mandela est purement psychologique : notre cerveau, influencé par le souvenir de ces nouvelles, corroborés par les croyances d’autres personnes, finit par créer dans notre esprit l’illusion d’un souvenir. On devient alors persuadé d’avoir vraiment vécu les choses de cette manière, quitte à défendre l’existence de réalités alternatives plutôt que de parvenir à déceler son erreur.
L’avènement des Deep Fakes : ce que nous devons retenir de l’effet Mandela aujourd’hui
Si l’effet Mandela pourrait ne constituer qu’une curiosité concernant le fonctionnement du cerveau humain, il est au contraire générateur de nombreuses inquiétudes depuis quelques années. En effet, l’avènement des réseaux sociaux et le développement des intelligences artificielles a débouché sur la diffusion de nombreuses Deep Fakes. Il s’agit de représentations multimédia faisant apparaître des personnes réelles dans des situations qu’elles n’ont pourtant jamais vécues.
Le problème vient du fait que le précédent créé par l’effet Mandela montre que de nombreuses personnes pourraient dès lors s’appuyer sur ces Deep Fakes pour créer involontairement de fausses mémoires et se mettre à croire mordicus à certains événements. Il est donc urgent, maintenant que n’importe qui peut savoircomment déverrouiller un ordinateur sans en posséder le mot de passe, d’apprendre à protéger nos données, nos photos et nos vidéos. Il est également urgent de lancer de vrais politiques d’éducation critique aux médias, afin de savoir comment distinguer les Deep Fakes des vraies informations.